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Il est comme ça… N’Golo Kanté

Chronique. Chaque semaine, Philippe Ridet croque une personnalité qui fait l’actualité. Comme le footballeur qui, selon les révélations des « Football Leaks », a refusé un montage offshore.

Publié le 23 novembre 2018 à 12h22, modifié le 23 novembre 2018 à 12h22 Temps de Lecture 2 min.

Il est arrivé en même temps que les premières vitrines décorées des magasins. Mais c’est dans le douzième arrondissement de Paris, à proximité du siège du site d’information Mediapart, que l’esprit de Noël s’est mis à souffler très fort. Une suave odeur de pain d’épices et de pomme d’amour baigne le journal en ligne fondé par Edwy Plenel. Là où d’habitude on chasse le fraudeur, débusque les planqués du fisc, on vante désormais les trains qui arrivent à l’heure, on exalte les vertus civiques. Un footballeur paye ses impôts : scoop ! En titrant un papier consacré à N’Golo Kanté « Le joueur qui ne voulait pas être payé à Jersey », le média français – qui publie les « Football Leaks » exhalant des relents crapoteux du ballon rond et de ses serviteurs – passe un bon coup de chiffon doux sur le marbre poli du piédestal où est juché le milieu défensif des Bleus.

Trop timide pour être bavard, il a trouvé les meilleurs attachés de presse au monde : les autres.

Son humilité et son abnégation avaient fait de « l’homme aux quinze poumons », comme le surnomment ses co-équipiers, un modèle ; il est devenu un héros en refusant un montage d’optimisation fiscale qui lui aurait permis de détaxer une partie de son salaire (5 millions d’euros net par an quand même) versé par son club, Chelsea, par le biais d’une société que le joueur a créée à Jersey. On exagère ? Oui, un peu. La réalité est moins édifiante. L’international en aurait bien mis un peu à gauche, s’il n’avait craint de se faire prendre par la patrouille.

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Mais que vaut ce soupçon ? Même Mediapart, dont la notoriété grandit à proportion de celles de ses cibles – président de la République, ministres, milliardaires –, doit constater qu’il est difficile de rayer, ne serait-ce que d’un ongle, l’armure de popularité que les Français ont bâtie autour de leur idole de poche (1,68 m). Parce qu’il a refusé une combine qu’il pensait dangereuse, N’Golo Kanté, franco-malien, né à Paris le 29 mars 1991 d’un père éboueur, tôt disparu, et d’une mère femme de ménage, a reçu le Ballon d’or de l’esprit citoyen.

C’est trop ? Quoi qu’il fasse, il échappe aux catégorisations qui valent pour le reste des vivants. La tautologie est sa figure de rhétorique. Griezmann est sympa, Pogba est chambreur, Mbappé est rapide, N’Golo Kanté est N’Golo Kanté. What else ? Il n’a besoin d’aucun adjectif pour escorte. En lui donnant le prénom d’un ancien roi bambara parti de rien pour arriver au sommet, ses parents l’ont rendu, comme Achille trempé dans le Styx, invulnérable et suffisant à lui-même. Trop timide pour être bavard, modeste au point de laisser croire qu’il serait moins bon que ses partenaires, il a trouvé les meilleurs attachés de presse au monde : les autres. « Il n’a pas de limites », s’extasie un ancien entraîneur. « Jouer avec lui, c’est jouer à douze », vante un coéquipier.

Ce sont les autres qui égrènent les étapes de son apprentissage : Suresnes, Boulogne-sur-Mer, Caen, Leicester, Londres. Ce sont eux, encore, qui se plaisent à raconter ce que sa modestie aurait préféré taire : la fois où il est arrivé en Mégane à Leicester ; la fois où on l’a vu au supermarché à trottinette ; la fois où, ayant raté l’Eurostar Londres-Paris, il s’est retrouvé, après un détour par la mosquée, à dîner et jouer à la PlayStation avec des admirateurs. « Il a même voulu faire la vaisselle. On ne l’a pas laissé faire », a témoigné son hôte d’un soir. Manquerait plus que ça. Déjà qu’il paye ses impôts…

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