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Comment le lobby des implants médicaux a fait plier la Commission européenne

A l’aide de documents internes à la Commission européenne et de sa correspondance avec les industriels, l’enquête des « Implant Files » a pu reconstituer une décennie de lobbying pour affaiblir la réglementation sur les dispositifs médicaux.

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Publié le 27 novembre 2018 à 12h00, modifié le 27 novembre 2018 à 16h46

Temps de Lecture 14 min.

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Prothèse de hanche sans ciment retirée d'un patient.

« J’ai honte et j’ai honte de mes collègues. Cela me met tellement en colère que j’en pleure parfois. » Au fil de ses mandats à Bruxelles, l’eurodéputée Dagmar Roth-Behrendt, 65 ans, en a vu défiler des textes de loi. Les souvenirs d’un seul, cependant, laissent à la socialiste allemande le goût amer d’un « immense échec », et même une « blessure ouverte », comme elle l’a confié à nos partenaires de la chaîne allemande NDR dans l’enquête du Consortium international des journalistes d’investigation (ICIJ). Cette loi concerne les pacemakers, les pompes à insuline, les prothèses de hanche et les défibrillateurs dans l’Union européenne, ce vaste éventail de dispositifs médicaux, les implants.

Lancé en 2008, le règlement européen qui les encadre n’a été adopté qu’en avril 2017. Et ce à cause d’une décennie de lobbying sans relâche des industriels du secteur. Mais surtout une décennie de compromis et d’accommodements politiques à la Commission européenne, au Parlement – et des gouvernements. Le Monde et ses partenaires ont épluché pendant plusieurs mois des dizaines de documents internes des administrations européennes, obtenus en toute légalité grâce aux textes sur l’accès du public aux documents de l’UE.

L’enquête a permis de reconstituer comment les lobbyistes de l’implant sont parvenus, à l’aide d’arguments trompeurs et de brochures sponsorisées, à convaincre des décideurs européens et à faire passer la santé publique après les intérêts industriels. Il s’agit de la campagne de lobbying la plus « intense » dont Mme Roth-Behrendt a été témoin en vingt-cinq ans à Bruxelles, dit-elle, « à la seule exception de celles des fabricants de tabac ».

« Défaillances » du système de contrôle

Quand la Commission entreprend la refonte de la législation européenne sur les dispositifs médicaux, son constat est pourtant alarmant. « Le système actuel ne garantit pas le niveau de protection de la santé le plus élevé possible », relève un document de 2008. En raison d’un « manque d’informations de base », l’Europe ignore quels implants « sont sur le marché et dans quelle mesure ils ont été contrôlés ». Or les alertes n’ont pas cessé ces dernières années.

Dès 2002, un groupe d’experts spécialisé de la Commission s’inquiétait de « la tendance claire – à savoir une augmentation constante – du nombre » d’incidents liés aux dispositifs médicaux. Les autorités espagnoles signalaient un bond de 20 à 332 incidents entre 1995 et 2000 ; les Pays-Bas de 87 à 467. Une hausse jugée néanmoins « très faible » par rapport à d’autres marchés comparables dans le monde, soulignaient les experts, suspectant une importante sous-estimation : « Il est improbable que les dispositifs médicaux soient plus “sûrs” au sein de l’UE. »

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