La tension monte encore entre la Russie et l’Ukraine

Un tribunal de Crimée a placé en détention provisoire douze des marins ukrainiens capturés dimanche par les gardes-côtes russes.

 Un soldat ukrainien à Mariupol.
Un soldat ukrainien à Mariupol. Sega Volskii/AFP

    Russie - Ukraine, épisode 2. Quatre années après l'annexion de la Crimée ukrainienne par Moscou et le conflit qui s'en est suivi, la tension monte entre les présidents Vladimir Poutine et Petro Porochenko, faisant redouter une nouvelle escalade.

    Mardi, un tribunal de Crimée a placé en détention douze marins ukrainiens sur les 24 faits prisonniers dimanche par les garde-côtes russes. Deux vedettes et un remorqueur avaient été accusés d'avoir franchi illégalement la frontière russe, au moment de passer par le détroit de Kertch, qui relie la mer Noire à la mer d'Azov. Les militaires russes ont même ouvert le feu sur un des bateaux, faisant jusqu'à six blessés.

    L'incident a été qualifié de « provocation » par la Russie, tandis que l'Ukraine a dénoncé un « acte d'agression » de Moscou, réclamant la libération de ses marins et le retour de ses navires. Il s'agit de la première confrontation militaire ouverte entre les deux pays depuis la crise en Crimée en mars 2014.

    La France demande un « apaisement » des deux parties

    « La Russie est passée à l'étape suivante de son agression et nous avons de sérieuses raisons de penser qu'elle est prête à poursuivre une attaque terrestre », a déclaré le président Porochenko, qui a fait imposer la loi martiale pour trente jours dans certaines régions du pays. De son côté, Vladimir Poutine a mis en garde l'Ukraine contre tout acte « irréfléchi » et a fait part à la chancelière allemande Angela Merkel de sa « sérieuse préoccupation » à l'égard de la situation, demandant à Berlin de faire pression sur Kiev. La France a pour sa part demandé « un apaisement » aux deux parties. Donald Trump, lui, a menacé d'annuler sa rencontre avec le président russe lors du G20 qui se tient cette semaine en Argentine.

    La mer d'Azov est un enjeu pour l'Ukraine et la Russie qui s'y livrent une lutte d'influence. Mais la possibilité d'un nouveau conflit armé semble peu probable. « Les Ukrainiens n'ont pas les moyens militaires pour assumer une escalade, et les Russes n'y ont pas intérêt », analyse Arnaud Dubien, chercheur associé à l'Institut des relations internationales et stratégiques (IRIS), spécialiste de la Russie.

    Une « guerre du gaz » à prévoir

    Et si cet incident s'inscrit dans une période de fortes tensions entre l'Ukraine et la Russie, il intervient aussi à quelques mois seulement d'élections pour Porochenko. « C'est une affaire à tiroirs », poursuit Dubien. Selon lui, les Ukrainiens ont pu anticiper la réaction russe, espérant qu'elle renforce le soutien populaire autour du président. « Petro Porochenko est dans une surenchère nationaliste pour se faire réélire », poursuit Arnaud Dubien, alors que des élections doivent se tenir le 31 mars prochain. L'actuel président ukrainien, qui est en mauvaise position dans les sondages, souhaitait initialement que la loi martiale s'applique à une durée plus longue que seulement 30 jours, ce qui lui aurait permis de repousser le scrutin.

    Si le conflit n'éclate pas sur le plan militaire, il pourrait se déporter sur le terrain énergétique. C'est en 2019 que doit être renégocié l'accord entre Kiev et Moscou, concernant le gaz que les Russes acheminent vers l'Europe à travers l'Ukraine. Outil de pression diplomatique pour Porochenko. Une « guerre du gaz » est même à prévoir selon Arnaud Dubien. Et la tension entre les deux pays ne risque pas de baisser.