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Rentabilité des cotisations retraite : le grand écart

Un euro cotisé, c’est combien de pension, au final ? A la veille de la réforme, qui doit instaurer un régime universel, une étude chiffre les différences de rentabilité des cotisations de retraite entre les statuts professionnels.

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Publié le 28 novembre 2018 à 06h00, modifié le 28 novembre 2018 à 07h55

Temps de Lecture 3 min.

Selon des calculs réalisés par les cabinets Sapiendo et Deloitte, les rentabilités vont en effet, pour l’heure, du simple au triple en fonction des statuts professionnels.

Qu’« un euro cotisé donne les mêmes droits quel que soit le statut de celui qui a cotisé ». C’est le grand principe de la réforme des retraites annoncée pour 2019. Cette égalité de rentabilité des cotisations est aujourd’hui loin d’être la règle : selon des calculs réalisés par les cabinets Sapiendo et Deloitte, les rentabilités vont en effet, pour l’heure, du simple au triple en fonction des statuts professionnels: de 2,25 % pour un fonctionnaire d’Etat gagnant 50 000 euros nets par an, à 7,18 % pour un libéral aux mêmes revenus.

La cotisation du salarié du privé affiche de son côté un 4,63 %, ce qui signifie que pour un euro cotisé en 2018, il obtiendrait à terme, selon les règles actuelles, 4,63 centimes de rente annuelle (donc 46,30 euros pour 1 000 euros de cotisation). « Ces écarts montrent à quel point l’harmonisation sera un challenge », note Franck Chéron, associé Capital humain chez Deloitte.

Pour leurs estimations, les auteurs de l’étude ont imaginé des cas types d’actifs de 50 ans (deux fonctionnaires, un salarié du privé, un artisan, un libéral, etc.) et ont comparé pour chacun le montant des cotisations versées en 2018 au montant de pension annuelle fictivement acquis en échange, dans l’hypothèse d’un départ à la retraite à 62 ans à taux plein. Le pourcentage affiché correspond à la rentabilité de l’ensemble de leurs régimes, de base et complémentaires.

Un euro cotisé rapporte 15 % de moins pour un cadre supérieur

Ces écarts n’ont rien de surprenant, chaque statut relevant dans notre système de retraite de régimes différents (il en existe une quarantaine), appliquant des modes de calcul des pensions tout aussi variés.

Et même au sein d’un régime, la rentabilité d’un euro de cotisation ne sera souvent pas la même selon le niveau de rémunération. Dans l’étude, un euro cotisé par le salarié du privé gagnant 100 000 euros nets rapporte ainsi 15 % de moins que celui cotisé par le salarié du privé payé 20 000 euros.

« Dans leur régime de base, les salariés à hauts revenus cotisent sur la totalité de leur salaire alors que leur pension est calculée sur la base d’un salaire plafonné [NDLR : à 39 732 euros en 2018], ces cotisations non productives de droits diminuent la rentabilité de leurs cotisations globales », décrypte Valérie Batigne, présidente de Sapiendo.

Ce genre de subtilités se retrouve par exemple dans le régime de base des libéraux, un système par points, poursuit-elle. « Chez eux, la baisse de rentabilité en fonction de la rémunération s’explique par le fait qu’un euro de cotisation donne droit à moins de points de retraite à partir d’un certain niveau de revenu. »

Des niveaux de cotisations très variés

Attention, ces rentabilités ne reflètent pas les niveaux de pension. Car eux dépendent en outre, bien sûr, du niveau des cotisations versées. Les auteurs de l’étude ont donc réalisé une autre comparaison entre les différents statuts, portant cette fois non pas sur le montant de rente obtenu par euro cotisé, mais par euro gagné (en net). Avec des résultats totalement différents. Ainsi, une rémunération nette de 20 000 euros par an rapportera 434 euros de rente annuelle pour un fonctionnaire disposant de peu de primes, contre 224 euros pour le libéral de l’étude.

« En cause : des niveaux de cotisations très inégaux d’un statut à l’autre », indique Valérie Batigne. « Ils sont plus hauts dans les statuts où il y a deux payeurs, l’actif et l’employeur. Chez les fonctionnaires d’Etat notamment, le niveau de contribution de l’Etat employeur est très élevé - au point que les cotisations versées représentent au total quasi 100 % de la rémunération nette pour notre exemple de fonctionnaire payé 20 000 euros par an. A l’inverse, les niveaux de cotisations globaux sont bien moins élevés chez les indépendants, pour lesquels il n’y a qu’un payeur, l’indépendant lui-même. »

Le poids de l’histoire

« Ces différents niveaux de contribution sont le fruit de l’histoire », rappelle l’économiste spécialiste des retraites Philippe Crevel. « Après la seconde guerre mondiale, les indépendants ont notamment refusé d’être intégrés à la Sécurité sociale. Pour des raisons économiques ils ne voulaient pas être soumis aux mêmes niveaux de cotisation que les salariés car ils comptaient sur la revente de leur fond de commerce ou de leur entreprise pour leur retraite. Mais aussi parce qu’ils ne souhaitaient pas être soumis au diktat des syndicats, associés à la gestion du régime général. »

Que deviendront ces différents niveaux de cotisation avec la réforme ? Si fonctionnaires et salariés doivent être soumis aux mêmes taux, les indépendants continueront à jouir de taux « adaptés », a assuré le gouvernement. « Attention donc à ne pas confondre : si un euro cotisé donne à l’avenir les mêmes droits à pension, cela ne signifie pas qu’un euro gagné donnera les mêmes droits », alerte Valérie Batigne.

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