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Livraison de repas : la justice reconnaît un lien de subordination entre Take Eat Easy et un coursier

C’est la première fois qu’elle statue sur le lien contractuel entre un livreur et sa plate-forme numérique. Cela pourrait ébranler tout le modèle économique du secteur.

Le Monde avec AFP

Publié le 28 novembre 2018 à 18h04, modifié le 28 novembre 2018 à 20h53

Temps de Lecture 2 min.

La Cour de cassation, plus haute juridiction française, a établi mercredi 28 novembre un lien de subordination entre la défunte société de livraison de repas Take Eat Easy et l’un de ses coursiers à vélo. C’est la première fois qu’elle statue sur le lien contractuel entre un livreur et sa plate-forme numérique. Les livreurs de Take Eat Easy étaient enregistrés comme autoentrepreneurs, une condition obligatoire pour travailler avec la plate-forme belge TEE, dont la liquidation en août 2016 a mis sur le carreau 2 500 personnes en France. Tous avaient signé avec l’application un contrat de prestation de service. Cette décision, qui ouvre la requalification en salariat, pourrait ébranler tout le modèle économique du secteur.

L’un des livreurs avait saisi les prud’hommes pour demander une requalification de sa relation contractuelle avec TEE en contrat de travail. « Le conseil de prud’hommes puis la cour d’appel s’étaient déclarés incompétents », rappelle la Cour de cassation dans une note explicative. La cour d’appel de Paris avait notamment motivé sa décision par le fait que « le coursier n’était lié à la plate-forme numérique par aucun lien d’exclusivité ou de non-concurrence et qu’il restait libre chaque semaine de déterminer lui-même les plages horaires au cours desquelles il souhaitait travailler ou de n’en sélectionner aucune s’il ne souhaitait pas travailler ».

« Décision très importante »

La Cour de cassation établit au contraire, dans l’arrêt rendu mercredi, que le système de géolocalisation permettant à l’entreprise de suivre en temps réel la position du coursier, ainsi que l’existence d’un pouvoir de sanction ne permettent pas d’« écarter la qualification de contrat de travail ». Elle casse donc l’arrêt rendu le 20 avril 2017 par la cour d’appel de Paris et ordonne un nouveau procès en appel.

« Cet arrêt a le mérite de dire les choses clairement : il n’y a pas antinomie entre contrat de travail et travailleurs des plates-formes », a estimé Manuela Grévy, avocate du livreur et de la CGT à la Cour de cassation.

« C’est une décision très importante », a réagi Gilles Joureau, avocat qui a défendu aux prud’hommes une douzaine de coursiers de Take Eat Easy, tous déboutés. Pour lui, « cet arrêt couronne un long combat pour la reconnaissance du lien de subordination ».

« C’est bien que la Cour de cassation tranche enfin ces questions », a également salué Me Kevin Mention, qui conseille aux prud’hommes une centaine d’anciens livreurs Take Eat Easy, « sans issue favorable » pour l’instant. Il accompagne également la plainte au pénal déposée contre Take Eat Easy par 119 livreurs pour travail illégal et dissimulé.

« Immense victoire »

Pour la CGT, les juges confirment que « les travailleurs ubérisés sont des salariés relevant du code du travail ». « Cette décision est une immense victoire pour tous les travailleurs “uberisés”, qu’ils soient livreurs à vélo, chauffeurs VTC ou tant d’autres puisqu’ils peuvent, désormais, faire reconnaître leur statut et leurs droits fondamentaux de salariés », déclare le syndicat dans un communiqué en citant, entre autres, le « smic, congés payés, indemnisations des arrêts maladie ».

Pour la Fédération nationale des autoentrepreneurs, cette décision « est susceptible de porter atteinte à une économie émergente ». « Si ces sanctions étaient appliquées à la microentreprise, tout le modèle de sous-traitance géolocalisée dans le secteur de la livraison serait requalifiable », peut-on lire dans un communiqué. Elle estime « que le lien de subordination ne peut être caractérisé dans la mesure où ce livreur avait toute liberté dans les jours, horaires et organisations du travail », et ajoute que « ces évolutions culturelles, économiques et sociales devraient être prises en compte par les juges ».

Le Monde avec AFP

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