Gilles Le Gendre : «On n’est pas là pour surfer sur les colères des Gilets jaunes»

Pour Gilles Legendre, patron des députés marcheurs à l’Assemblée, il faut changer la façon de gouverner pour répondre aux Gilets jaunes.

 Paris, le 28 novembre. « Les Gilets jaunes ont le mérite de nous donner l’opportunité, non pas de changer de politique, mais de changer la manière de la faire » analyse Gilles Le Gendre.
Paris, le 28 novembre. « Les Gilets jaunes ont le mérite de nous donner l’opportunité, non pas de changer de politique, mais de changer la manière de la faire » analyse Gilles Le Gendre. LP/Delphine Goldsztejn

    Face au mouvement des Gilets jaunes, le député de Paris Gilles Le Gendre, également président du groupe LREM à l'Assemblée nationale, considère que « les solutions vont désormais se construire de façon beaucoup plus proche des Français grâce à la grande concertation nationale ».

    Pensez-vous que les déclarations d'Emmanuel Macron soient de nature à calmer la colère des Gilets jaunes ?

    GILLES LE GENDRE. Ces déclarations vont incontestablement dans le bon sens. Mais qu'on ne se trompe pas sur l'analyse du moment. C'est un moment crucial, non pas pour Emmanuel Macron, sa majorité ou le macronisme. Mais crucial pour le pays et pour la démocratie. Ce qui est en jeu, c'est de démontrer notre capacité à gouverner et à transformer la France d'une manière radicalement différente de celle qui a prévalu pendant quarante ans, qui fait qu'à chaque fois qu'un gouvernement a buté sur une difficulté, il a calé. Le chef de l'Etat et le Premier ministre reconnaissent qu'il fallait revoir la méthode. Si les Gilets jaunes ont un mérite, et ils en ont un, c'est de nous donner l'opportunité non pas de changer de politique mais de changer la manière de la faire. Nous avons commencé de transformer la France pour les Français, maintenant, nous devons transformer la France avec les Français.

    Comment intégrer les Gilets jaunes dans cette concertation ?

    Les Gilets jaunes, nous leur tendons évidemment la main. Mais la difficulté est de leur côté. A eux de s'organiser pour que, comme les corps intermédiaires ou les associations, ils puissent participer à cette concertation.

    Édouard Philippe a raison quand il dit ne vouloir les recevoir que s'ils trouvent un représentant institutionnel ?

    Par définition, nous ne pouvons pas recevoir 250 000 personnes à Matignon! Dès lors que nous allons rentrer dans une phase institutionnelle de la concertation, nous devons le faire dans un cadre. Et puis les Gilets jaunes ne sont pas forcément un mouvement qui a vocation à perdurer.

    Admettez-vous que vous n'avez pas vu venir cette crise ?

    Malgré les baisses d'impôt, y compris la disparition de l'ISF que nous assumons pleinement parce qu'elle relance l'investissement, et la baisse de cotisations, le ras-le-bol fiscal accumulé depuis des décennies a été tel que la cocotte-minute a fini par exploser. Ce n'est pas nous qui l'avons fait exploser. Cela dit, nous devons embarquer les Français pour qu'ils s'emparent de notre projet de transformation, parce qu'on n'a pas toujours donné le sentiment qu'on les écoutait assez. Celle entamée en début de quinquennat avec des réformes lourdes et parfois douloureuses.

    Cette colère ne vous pousse pas à modifier votre politique ?

    Non. L'équilibre de notre politique doit rester inchangé. Nous ne sommes pas là pour surfer sur les colères, y céder ou y succomber. Nous sommes là pour apporter des solutions. Et ces solutions vont désormais se construire de façon beaucoup plus proche des Français grâce à la grande concertation nationale.

    Comment allez-vous mettre en ordre de marche pour déployer cette concertation ?

    En passant toujours plus de temps dans nos circonscriptions. Il y a une forte attente des Français envers nous. Tout est en train de se remettre en ordre de marche pour que nous retrouvions l'élan de la grande marche de la campagne présidentielle. Un élan que nous devons reprendre parce que les parlementaires avaient pour priorité les réformes, après 18 mois de travail législatif. Et puis, se mettre à gouverner du jour au lendemain pour des gens venus de tous horizons et souvent sans expérience politique, cela prend aussi du temps.

    Votre mouvement, En marche !, qui va se désigner samedi un nouveau patron a-t-il besoin d'être repris en main ?

    Il a surtout besoin de retrouver un nouvel élan, à l'évidence. Le futur délégué général aura un engagement exclusif au service du mouvement. Il va lui permettre de reprendre un second souffle au moment où, précisément, on va avoir bien besoin de lui pour articuler la grande concertation nationale. Quelque part, tout cela tombe au bon moment.