Depuis des semaines, Donald Trump répète ses reproches en boucle : « Ma plus grande menace, c’est la Fed. » En pleine correction boursière, alors que les nuages s’accumulent sur l’économie mondiale, le président des Etats-Unis accuse la banque centrale américaine de relever ses taux beaucoup trop rapidement et voit en elle un danger « pire que la Chine ». Le président américain s’en est même pris à son secrétaire au Trésor Steven Mnuchin, qui lui avait conseillé de nommer fin 2017 Jerome Powell, un républicain modéré, à la tête de l’institution.
Jérôme Powell, lui, se serait volontiers passé de ces remarques, alors qu’il a effectivement une tâche des plus compliquées à accomplir : resserrer le coût du crédit pour empêcher la surchauffe, mais pas trop, afin d’éviter la récession. Le président de la Fed s’efforce de ne pas entrer dans le petit jeu du président, soit en lui obéissant soit en faisant le contraire de ce qu’il dit pour afficher de manière puérile son indépendance.
Et ce mercredi 28 novembre, devant un parterre de banquiers et d’économistes réunis à New York, M. Powell a tenu des propos qui ont fait bondir les marchés (+2,5 % pour le Dow Jones et +2,95 % pour le Nasdaq). Peu importe que cela aille dans le sens souhaité par Donald Trump.
« Il n’y a pas de politique prédéterminée »
M. Powell a en effet indiqué que les taux étaient « juste en dessous du niveau qui serait neutre pour l’économie ». En clair, il n’est pas indispensable de remonter tambour battant le loyer de l’argent. « Il n’y a pas de politique prédéterminée », a indiqué M. Powell, précisant que la Fed « fera très attention aux données économiques et financières nouvelles ».
La veille, le vice-président de la banque centrale Richard Clarida, avait déclaré qu’il faudrait faire preuve « de jugement et d’humilité ». Les opérateurs estiment encore que la Fed relèvera ses taux (actuellement compris entre 2 et 2,25 %) lors de sa réunion du 19 décembre, pour la neuvième fois depuis fin 2015, mais sont désormais plus prudents sur les hausses suivantes. L’inflexion est nette.
« Powell indique que l’économie va bien mais que, si la situation économique et les conditions de financement se dégradent, il sera là », analyse Thomas Julien, économiste new-yorkais de Natixis, qui estime aussi que le président de la Fed « ouvre la voie à un resserrement monétaire plus lent en 2019 ». La banque d’affaires Morgan Stanley en déduit que la réserve fédérale remontera d’un quart de point ses taux à trois reprises d’ici à juin 2019, avant de mettre ensuite le bouton sur « pause ».
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