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États-Unis: poursuivi par l'État fédéral, le géant Google jugé pour abus de position dominante

Un procès que l'on pourrait qualifier d'historique s'est ouvert ce mardi 12 septembre aux États-Unis. L'État fédéral poursuit Google en justice pour abus de position dominante. C'est une nouvelle tentative du gouvernement Biden de freiner la toute-puissance des géants du numérique.

Le siège californien de Google à Mountain View, le 3 janvier 2013.
Le siège californien de Google à Mountain View, le 3 janvier 2013. AP - Marcio Jose Sanchez
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Google fait partie de ces rares entreprises à s'être imposées dans le vocabulaire courant et dans les dictionnaires. Son moteur de recherche domine à ce point le marché qu'en anglais, « to google » est devenu synonyme de « faire une recherche sur Internet », voire d'Internet tout court. Mais ce quasi-monopole dont jouit Google depuis bientôt 20 ans, est-ce que l'entreprise le doit aux qualités de son produit ? Ou bien a-t-elle abusé de sa position sur le marché pour favoriser son offre et décourager la concurrence de manière déloyale ?

C'est à cette question épineuse que devra répondre un juge fédéral qui présidera les audiences devant une cour de Washington. Depuis trois ans et sous deux administrations différentes, le ministère de la Justice enquête pour montrer que Google a tout fait pour être le moteur de recherche par défaut, écarter de potentiels concurrents et s’accaparer 90% du marché. Le patron de Google et les principaux dirigeants de l’entreprise devraient témoigner durant les dix semaines que le procès est prévu pour durer, rapporte notre correspondant à Washington, Guillaume Naudin.

Le précédent de Windows

On connait déjà leur ligne de défense : rien d’illégal n’a été fait et le succès vient de l’amélioration constante de la qualité des services offerts par l’entreprise. Ce n’est pas l’avis de la concurrence ou ce qu’il en reste. L’un des dirigeants de DuckDuckGo, un moteur de recherche qui met l’accent sur la protection de la vie privée, explique qu’il faut 15 étapes à un utilisateur pour que le service devienne le moteur de recherche par défaut sur les téléphones Androïd de Google.

Qu’est-ce que risque Google dans ce procès ? « Le pire des cas pour Google, ça peut être une scission, explique Erwan Le Noan, consultant en stratégie et concurrence au cabinet Altermind. Dans un moindre cas, Google risque des amendes ou bien, éventuellement, le juge déniera l’analyse du ministère de la Justice américain. L’entreprise peut être sanctionnée pour ce qu’elle a fait. Ça va ensuite l’obliger à corriger les comportements qu’elle a avec d’autres opérateurs. » Pour le consultant, ce procès « peut permettre aux clients de Google, fournisseurs, aux entreprises qui se sentent lésées par les pratiques qui ont été sanctionnées, d’engager des recours pour récupérer des dommages et intérêts. Et puis, ça sert aussi comme modèle pour les autres entreprises qui, elles-mêmes, sont des actrices dominantes sur leur marché. Elles vont apprendre de cette manière ce qu’elles peuvent faire ou non. »

Ce procès est le premier de cette ampleur au XXIe siècle et il rappelle forcément celui mené il y a 25 ans contre Microsoft, accusé à l'époque d'abus de position dominante sur le marché de l'informatique avec son système d'exploitation Windows. Mais à l'époque, Microsoft apparaissait comme l'unique colosse du secteur quand Google ne domine plus aujourd'hui qu'une poche d'un espace numérique devenu protéiforme. Il n'y a plus un géant, mais des géants... et tous ne sont pas Américains. En 1998, Microsoft fut reconnu coupable, mais réussit à éviter la dislocation en appel.

Des poursuites contre Google lancées sous Trump et confirmées par Biden 

Dans ce procès, les poursuites avaient été lancées sous Donald Trump en 2020, mais ont été reprises par Joe Biden. Explications d’Erwan Le Noan, consultant en stratégie et concurrence au cabinet Altermind. « C’est une initiative qui intervient à la suite d’un long changement progressif dans la politique américaine, qu’on n’aurait pas imaginé il y a dix ou quinze ans à l’époque d’Obama. Aujourd’hui, autour du président Biden, on trouve des personnalités issues du monde académique qui ont été les premières à porter le fer contre les Gafam il y a maintenant un peu plus de dix ans », estime le consultant. 

« Selon ces personnes, il y avait une concentration anormale de l’économie numérique, ça posait un certain nombre de problèmes de concurrence. Elles se sont organisées en mouvements académiques, en "think tanks", elles ont porté le fer principalement au sein du Parti démocrate, renouant avec une vision américaine qui s’inquiète du pouvoir de marché des plus grands opérateurs économiques. Elles ont été aidées en cela par Trump qui, pour des raisons différentes, plus politiciennes, a décidé d’engager l’offensive au cours de son mandat. Donald Trump reprochait à Amazon d’être propriétaire d’un journal qui lui était hostile, s’inquiétait que les Gafam soient trop proches des démocrates, paradoxalement. Donc, on a un mouvement de conjonction entre une partie des républicains et une partie des démocrates, qui s’inscrit dans une volonté de réaffirmer le pouvoir du politique sur le champ économique à travers la régulation. »

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