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Comment la perte de repères politiques fabrique des « leaders charismatiques » forts

Orban, Erdogan, Trump, Macron… Ces dernières années, les situations de crise ont favorisé la personnalisation du pouvoir. Au risque d’un recul de la démocratie ?

Publié le 30 novembre 2018 à 06h00, modifié le 30 novembre 2018 à 12h29 Temps de Lecture 9 min.

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Emmanuel Macron, lors d’un rassemblement de campagne au Paris Event Centerle, le 1er mai 2017.

Les démocraties contemporaines connaissent, depuis plus de deux décennies, des transformations d’ampleur historique liées à l’interdépendance des économies et des sociétés. Aucune dimension de la politique n’est épargnée : les clivages politiques, les ­systèmes partisans, les affiliations des électeurs, tout semble bouger dans une accélération du temps qui donne le sentiment d’un grand désordre.

Plus grave, règne aujourd’hui une forte défiance. Le sentiment que les élus ont baissé les bras face à l’ampleur du changement, ou pire qu’ils n’ont plus d’empathie pour les citoyens, prédomine. ­Paradoxalement, ces évolutions ont redonné vie au ­mythe de « l’homme providentiel » ou de « l’homme fort » : puisque tant de repères ont sauté, pourquoi ne pas s’en remettre à des leaders qui montrent la voie à suivre ?

Si la tendance au leadership politique fort est ancienne, elle s’est néanmoins affirmée récemment : la décennie qui s’achève a montré de nombreux exemples d’émergence de leaders politiques, réussissant là où personne ne les voyait vainqueurs. Les victoires électorales de Recep Tayyip Erdogan (2014), de Donald Trump (2017), de Viktor Orban (2010) ont illustré de manière spectaculaire ce phénomène. Semblant ­parfois se jouer des prédictions, ils ont affiché à la face du monde un leadership plébiscitaire et ­décomplexé, mettant en cause parfois ouvertement les ­bases du consensus politique démocratique.

Legs du religieux

Différentes personnalités ont décliné, chacune à sa manière, cette tendance lourde à la personnalisation du pouvoir qui n’est pas nécessairement liée au « populisme », comme le montre la diversité des profils : Tony Blair, Silvio Berlusconi, Nicolas Sarkozy, Barack Obama, Luiz Inacio Lula da Silva, Justin Trudeau, Matteo Renzi. Emmanuel Macron les a rejoints depuis 2017, Jair Bolsonaro en 2018. Les différences de contextes politiques et de systèmes partisans dans lesquels leur leadership s’est affirmé sont grandes. Leurs bilans et leurs programmes ne sont pas les ­mêmes. Mais ces affirmations, souvent spectaculaires, de « leadership fort » nous disent des choses importantes sur l’évolution de la démocratie représentative. Le brouillage des repères politiques dans les ­situations de grandes crises ou mutations conduit-il à des formes de « démocratie plébiscitaire » avec à leur tête des « leaders charismatiques » forts ?

Pour répondre à cette question, il faut revenir vers la notion de « charisme » et la préciser, afin d’éviter tout abus d’usage. Pour les sciences sociales, cette notion est associée à la sociologie de la domination politique et de la légitimité développée par Max ­Weber (1864-1920). Pour Weber, dont l’œuvre porte notamment sur les rapports entre rationalité et croyances, le charisme est un legs du religieux dans le monde moderne. Il emprunte, en la retravaillant, la notion à la théologie de saint Paul : dans la tradition paulinienne, le « charisma » nomme les différentes grâces accordées par Dieu aux membres d’une communauté de fidèles.

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