La carte de France des départements les plus consommateurs de pesticides

Générations Futures présente aujourd’hui une carte de France des « phytos » qui montre notamment où sont vendus perturbateurs endocriniens et substances les plus toxiques.

 L’Aube est le département français où l’on a le plus vendu de produits phytosanitaires en 2017, avec 3276 tonnes de substances actives (photo d’illustration).
L’Aube est le département français où l’on a le plus vendu de produits phytosanitaires en 2017, avec 3276 tonnes de substances actives (photo d’illustration). AFP/DENIS CHARLET

    Le Nord, la Champagne, le Bordelais, la région nantaise et le littoral méditerranéen : ces régions de France semblent être les plus exposées aux pesticides, notamment aux plus néfastes pour la santé, selon des cartes que Générations Futures publie ce mardi sur son site et dont Le Parisien a eu la primeur.

    L'association de défense de l'environnement a utilisé une base de données qui dépend du ministère de la Transition écologique, la BNV-D (Banque nationale de ventes des distributeurs). Cette base intègre l'ensemble des déclarations annuelles des fournisseurs de pesticides en France. Un tableur de près de 770 000 lignes dans sa version la plus condensée, rien que pour 2017, qui montre où les produits sont vendus.

    L'Aube est le département français où l'on a le plus vendu de produits phytosanitaires en 2017, avec 3276 tonnes de substances actives, devant la Gironde, la Marne et le Vaucluse. « Dans l'Aube, il y a énormément de grandes cultures. Le vignoble champenois empiète également sur ce département. Il peut y avoir des effets de marge, avec des grosses Scop qui sont dans l'Aube mais qui vendent aussi dans la Marne », explique François Veillerette, directeur de Générations Futures. Selon nos calculs, les ventes dans ce département sont supérieures de 91 % à celles de 2008.

    « Mais quand on rapporte à l'hectare de surface agricole utile, les départements du Nord sortent du peloton de tête », poursuit François Veillerette.

    S'appuyant sur une liste de perturbateurs endocriniens établie par l'ONG TEDX, l'organisation a isolé ces substances qui peuvent avoir des effets sur le système hormonal. Dans ce classement, l'Eure-et-Loir, où s'étendent les plaines de la Beauce, rejoint les départements du Nord et du Bassin parisien. « La vigne et l'arboriculture sont des cultures qui consomment beaucoup de produits phyto et où l'on retrouve des perturbateurs endocriniens », précise François Veillerette.

    Générations Futures a par ailleurs distingué les substances dangereuses, dites CMR, ou cancérogènes, mutagènes et toxiques pour la reproduction, telles que définies par l'Union européenne. La Loire-Atlantique et la Marne semblent un peu plus épargnées.

    Des données plus précises… mais « cachées »

    En l'absence de mesures nationales sur la pollution des sols et de l'air par les pesticides, cette base de données BNV-D est celle qui offre la vision la plus nette sur l'exposition de la population à ces produits. Mais elle n'est pas parfaite. D'abord, parce que les informations fournies proviennent des déclarations des distributeurs eux-mêmes. « Elles peuvent donc être entachées de biais », prévient la plateforme Data.gouv.fr où les internautes sont invités à les télécharger.

    « Ce qu'on ne connaît pas, ce sont les produits achetés sur Internet ou en Espagne. Dans la mesure où l'Etat affirme que 85 à 95 % des acheteurs sont honnêtes dans leur déclaration, ce qui nous intéresse, ce ne sont pas les valeurs mais la tendance », explique Etienne Dervieux, de l'association Eau et Rivières de Bretagne, qui a obtenu que la BNV-D devienne publique en 2017.

    L'autre défaut, c'est que le produit n'est pas forcément épandu dans la commune où il est acheté. Les départements d'Ile-de-France, où les surfaces cultivées sont très faibles, peuvent ressortir sur ces cartes : des distributeurs ont leur siège à Paris. Ils ont la possibilité de déclarer leurs ventes à l'adresse du siège ou à celle de l'établissement, plus localement.

    On devrait bientôt pouvoir regarder plus loin qu'à l'échelle du département. Dans son plan biodiversité lancé en juillet, le gouvernement a promis de présenter des données de ventes plus précises, par code postal des acheteurs. Selon nos informations, ces versions de la BNV-D ont été publiées dès juin sur le site gouvernemental Eaufrance.fr, puis rapidement retirées : certaines données n'avaient pas été anonymisées, selon l'entourage de Nicolas Hulot, alors ministre de la Transition écologique.

    Ces chiffres « cachés » devraient être présentés dans les semaines qui viennent par les équipes de François de Rugy. Officiellement, cette fois-ci.