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Crash de Lion Air : l'avion n'aurait pas dû être autorisé à voler

Le Boeing 737 de Lion Air a piqué du nez à 26 reprises avant de s'abîmer en mer. Pour l'Agence de sécurité indonésienne, l'avion n'était plus en état de voler.

Le rapport préliminaire présenté ce mercredi ne révèle pas les causes de l'accident. Il faudra pour cela attendre le rapport définitif qui ne sera pas publié avant 2019.
Le rapport préliminaire présenté ce mercredi ne révèle pas les causes de l'accident. Il faudra pour cela attendre le rapport définitif qui ne sera pas publié avant 2019. (Achmad Ibrahim/AP/SIPA)

Par Bruno Trévidic, Claude Fouquet

Publié le 28 nov. 2018 à 07:32Mis à jour le 28 nov. 2018 à 16:42

Des instruments de mesure essentiels en panne à plusieurs reprises au cours des vols précédents, des pilotes qui luttent pour conserver le contrôle dès les premières minutes de vol, un système anti-décrochage qui s'acharne à faire piquer l'avion du nez 26 fois de suite en moins de 10 minutes… C'est le cauchemar vécu par l'équipage et les passagers du vol Lion Air 610 jusqu'à l'issue fatale, tel qu'il ressort du premier rapport d'enquête publié ce mercredi par l'Agence de sécurité des transports indonésienne.

Pas de conclusion à ce stade

Ce rapport préliminaire, disponible en ligne,n'avance à ce stade aucune conclusion sur les causes du crash du Boeing 737 Max de Lion, qui s'est écrasé en mer le 29 octobre. La piste initialement évoquée d'un problème sur un capteur de vitesse et des sondes d'incidence (AOA, angle of attack sensor) du Boeing 737 Max n'est ni confirmée, ni infirmée. « Nous continuons à avoir des réunions avec Boeing », a expliqué le responsable de l'agence. Pour les conclusions définitives, il faudra attendre la publication du rapport définitif, qui ne sera pas publié avant l'an prochain.

Des problèmes sur le vol précédent

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Toutefois, lors du vol précédent, le même appareil avait connu un dysfonctionnement de son système de pilotage automatique, probablement lié à des données incohérentes fournies par les sondes. L'équipage avait néanmoins pu se poser sans encombre à Jakarta, non sans avoir coupé le système de contrôle automatique du vol. Et d'après l'analyse des données extraites de l'un des enregistreurs de vol, tout porte à croire que les mêmes dysfonctionnements se sont produits sur le vol 610.

Un écart de 20 degrés entre les sondes

Selon ces données, ces deux sondes, qui permettent de mesurer l'angle de vol de l'avion, présentaient un écart constant de 20 degrés, fournissant ainsi de fausses informations à l'ordinateur de bord. Ce qui a probablement déclenché l'activation du système automatique anti-décrochage du Boeing 737 Max.

Un avion qui pique du nez à 26 reprises

Dès le décollage, ce système s'est d'abord manifesté par de fortes vibrations dans les deux manches de commande, afin d'alerter les pilotes sur le risque de décrochage. Après quoi le système a appliqué une action corrective automatique consistant à faire piquer du nez l'avion, afin de rétablir l'assiette de vol. C'est ce qui s'est produit à 26 reprises à bord du vol Lion Air, malgré les efforts des pilotes pour reprendre le contrôle de l'avion.

La compagnie pointée du doigt

Cependant, le rapport n'écarte pas à ce stade, d'autres facteurs possibles du crash. A commencer par la décision de la compagnie et des pilotes de maintenir l'appareil en exploitation malgré des incidents techniques répétés. Au cours du vol précédent, de Denpasar à Jakarta, « l'appareil a subi un problème technique mais le pilote a décidé de continuer le vol », a précisé Nurcahyo Utomo, le responsable de l'agence. Et selon le rapport de maintenance établi trois jours avant le drame, l'appareil livré en août dernier avait connu au moins six incidents plus ou moins sérieux au cours du seul mois d'octobre.

« L'avion n'était plus en état de voler et n'aurait pas dû continuer », estime le responsable de l'agence indonésienne, pointant ainsi du doigt la responsabilité de Lion Air. La compagnie low cost indonésienne doit prendre des mesures supplémentaires « pour améliorer la culture de sécurité », explique l'agence, en s'assurant notamment que « les documents opérationnels » qui répertorient notamment les réparations sur ses appareils « sont bien remplis et documentés ».

La réaction des pilotes

L'agence de sécurité aérienne indonésienne s'interroge également sur l'attitude des pilotes, qui auraient pu prendre connaissance des documents retraçant l'historique des vols. Il reste aussi à comprendre pourquoi les deux pilotes n'ont pas appliqué la procédure standard de perte de contrôle des gouvernes, qui consiste à déconnecter les automatismes, comme l'avait fait la veille un autre équipage de Lion Air, confronté au même problème sur le même appareil. D'après les données du vol, le commandant de bord, après avoir tenté de contrer à 21 reprises le système anti-décrochage, a finalement laissé la main au copilote… Qui n'a pas pu éviter le crash, sachant que la séquence n'a duré qu'une dizaine de minutes et que l'appareil, qui venait de décoller, n'était qu'à 1.500 mètres d'altitude.

A la recherche d'une des deux boîtes noires

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Une explication avancée par des représentants de pilotes américains, pourrait être l'ignorance par les pilotes de l'existence de ce nouveau système anti-décrochage à bord des Boeing 737 Max. Ceux-ci ont seulement eu le temps d'indiquer par radio « des problèmes du système de contrôle du vol ». Toutefois, la boîte noire contenant l'enregistrement des conversations et de sons du cockpit n'ayant pas été (encore) retrouvée, les enquêteurs ne sont pas en mesure d'en dire plus.

Bruno Trévidic et Claude Fouquet

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