Tribune. Beaucoup d’encre a coulé depuis l’annonce des grandes lignes du rapport commandé par Emmanuel Macron à Bénédicte Savoy et Felwine Sarr, quelques jours avant sa remise officiellement au président, le 23 novembre. Les partisans et opposants de la restitution des objets d’art africains conservés dans les collections nationales françaises aux pays du continent africain sur le territoire desquels ils ont été collectés dans des conditions plus ou moins violentes ou déséquilibrées, s’affrontent déjà au sein de vifs débats.
Mais lors de la remise du rapport, le président a clairement marqué sa volonté de poursuivre la voie tracée dans le discours qu’il avait prononcé à l’université de Ouagadougou en novembre 2017, annonçant qu’« en cohérence avec la démarche engagée et sur proposition du Musée du quai Branly-Jacques Chirac et du ministère de la culture, j’ai décidé de restituer sans tarder 26 œuvres réclamées par les autorités du Bénin, prises de guerre du général Dodds dans le palais de Béhanzin, après les sanglants combats de 1892. Ces œuvres pourront être présentées au public béninois dans le cadre du projet de musée ambitieux porté par la République du Bénin. Je remercie le Musée du quai Branly-Jacques Chirac de soutenir cette restitution. Les mesures opérationnelles, et le cas échéant législatives, seront prises pour que ces œuvres puissent retourner au Bénin, accompagnées du savoir-faire du musée qui les a conservées jusqu’à présent. »
Cet extrait du communiqué de presse de l’Elysée esquisse en quelques phrases, à l’occasion du geste fort promis au Bénin, les préconisations formulées par les auteurs dans leur rapport pour organiser la restitution du patrimoine culturel africain. Le rapport prend en effet une position très affirmée en définissant le terme « restitution » comme un transfert de propriété. Ce transfert pourrait donc être accordé aux pays qui revendiquent des objets collectés sur le continent africain dans des contextes militaires ou au cours de missions d’exploration, des objets donnés ou légués aux musées français par des agents de l’administration coloniale ou leurs descendants pendant la période de la colonisation, mais également les objets acquis dans des conditions avérées de trafic illicite après les indépendances.
Ces transferts de propriété, supposant le déclassement des objets des inventaires des collections nationales et leur sortie du domaine public, sont envisagés comme une exception au principe d’inaliénabilité des collections des musées, qui sera réservée aux seuls Etats dont les territoires correspondent à d’anciennes colonies françaises. Ces transferts seront négociés dans le cadre d’accords bilatéraux conclus entre l’Etat français et l’Etat revendiquant, une large place étant réservée à la coopération scientifique mise en œuvre au sein d’une commission d’experts bilatérale.
Il vous reste 66.86% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.