Le livre. Si vous vous êtes jamais demandé pourquoi les bulles de champagne semblent accélérer quand elles remontent dans une flûte, comment les araignées d’eau font pour ne pas sombrer ou comment les saumons peuvent remonter des rivières tumultueuses sans s’épuiser, ce livre est pour vous. Si la vue d’une équation provoque chez vous stupeur et tremblements, il vous est sans doute aussi destiné, comme instrument de conjuration.
Car si le physicien Thomas Séon a choisi de présenter de fascinantes lois de la nature, dites lois d’échelle, il n’a pas cédé à la facilité qui aurait consisté à renoncer à toute formulation mathématique. Il propose même une introduction à l’analyse dimensionnelle, cette méthode qui sollicite aussi l’intuition et le « sens physique » de ses adeptes. S’il prend le novice par la main, pour l’accompagner pas à pas sur des chemins parfois escarpés, le lecteur aura donc sa part d’effort à produire pour contempler ce panorama des lois universelles qui gouvernent le monde.
Mais ce paysage vaut vraiment le coup d’oeil ! N’est-il pas fascinant, par exemple, de constater que tous les mammifères, de la minuscule musaraigne à l’éléphant, naissent avec un potentiel d’environ 1,5 milliard de battements de cœur, que leur fréquence cardiaque fixe leur durée de vie ? Et de comprendre comment la taille et le métabolisme de ces animaux sont intimement liés pour arrêter ainsi en quelque sorte une limite à leur longévité – et à la nôtre ?
Plus on est grand, moins on est fort
Qu’est-ce donc qu’une loi d’échelle ? C’est une loi qui condense le plus simplement possible la variation d’une grandeur en fonction d’autres grandeurs. Elle peut par exemple décrire une relation entre la hauteur d’un arbre et le diamètre de son tronc, valable pour tous les arbres, quelle que soit leur taille. « Cette hauteur est proportionnelle à leur diamètre élevé à la puissance 2/3 », rappelle Thomas Séon.
Les lois d’échelle expliquent ainsi pourquoi plus on est grand, moins on est fort (en proportion), ce qui conduit le physicien à suggérer d’autres palmarès sportifs : le vainqueur serait celui qui s’éloignerait le plus de la courbe mettant en relation un gabarit et une performance. Naim Suleymanoglu, qui a soulevé 342,5 kg en 1988 alors qu’il ne pesait que 60 kg, serait ainsi le champion toutes catégories de l’haltérophilie mondiale !
Ces lois ont des implications dans une foule de domaines : architecture, ingénierie, écologie, urbanisme... Elles régissent aussi bien le vivant que les objets manufacturés, comme l’illustre la loi d’échelle du vol, qui trace une courbe mettant en regard la masse et la vitesse de croisière, le long de laquelle le moustique comme l’Airbus A389 viennent docilement se poser.
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